Il n’est pas évident de décrire le postulat de « les Garçons et Guillaume, à table ! ». Ainsi je commencerais par citer le synopsis officiel, tel qu’on peut le lire sur Allociné :
Le premier souvenir que j’ai de ma mère c’est quand j’avais quatre ou cinq ans. Elle nous appelle, mes deux frères et moi, pour le dîner en disant : « Les garçons et Guillaume, à table ! » et la dernière fois que je lui ai parlé au téléphone, elle raccroche en me disant : « Je t’embrasse ma chérie » ; eh bien disons qu’entre ces deux phrases, il y a quelques malentendus.
Guillaume Gallienne, acteur, sociétaire de la Comédie-Française, plus ou moins populaire pour ses petits rôles au cinéma (tout le monde se souvient au moins de la bande-annonce du Fanfan la tulipe de Gérard Krawczyk, pour Penélope Cruz prononçant « Fane-Fane »… et pour Guillaume Gallienne s’écriant « Ah non, ça c’est trop ! ») puis élevé au rang de célébrité de la pop culture au talent certain à travers sa séquence les Bonus de Guillaume pour le Grand Journal sur Canal +, n’est pas un garçon comme les autres.
Le comédien, qui garde de cette expérience un don pour interpréter les personnages féminins, comme on a pu le constater dans sa pastille sur Canal, révèlera cette histoire surprenante en 2008 dans une pièce de théâtre autobiographique, « Les garçons et Guillaume, à table ! ».
Le film en est la directe adaptation. Guillaume Gallienne y reprend bien entendu son rôle mais assure aussi la réalisation. Une position risquée et le film en pâtit certainement un peu : la narration m’a déstabilisé. Gallienne se montre régulièrement sur scène, racontant son spectacle, faisant du film une simple illustration de sa pièce en décors réels. Je n’ai pas vu ce spectacle, je le regrette, mais je ne vois pas l’intérêt de faire un film pour passer par la case mise en abyme. Une fois, au début, d’accord, très bien. Tout au long du film, la raison m’échappe et chaque retour sur la scène me faisait simplement un petit peu plus regretter de ne pas être allé le voir.
Le scénario tourne également bien trop longtemps autour du pot : à devoir attendre la moitié du film (au moins) avant que son personnage principal ne se découvre, n’apprenne qui il est vraiment, m’a mis un peu mal à l’aise. Pourtant sans avoir vu la pièce je connaissais l’histoire, Guillaume l’avait racontée sur de nombreux plateaux télé à l’époque… oui mais à l’époque. Ça date. Les détails m’avaient échappés. Et même avec le résumé d’Allociné tout n’est pas gagné. Disons que le film n’est pas clair sur ce que croit être Guillaume : une fille ? Un homosexuel ? Le doute plane très longtemps, jusqu’au moment où sa mère le traite à demi-mots de gay, un passage montré dans la bande-annonce (évitez quand-même de la regarder si vous le pouvez… ce qui n’est pas facile tant elle passe partout ces temps-ci).
Pour en finir avec l’aspect technique, si la photographie est ennuyeuse, la mise en scène propose tout de même quelques élans d’originalité, notamment dans les transitions parfois surprenantes. Un bon point pour conclure ce paragraphe bien trop long qui ne rend pas justice au film. j’ai été sévère.
Heureusement le film ne se résume pas à sa technique. Les garçons et Guillaume, à table ! est une comédie et sur ce plan là c’est une belle réussite. Gallienne alterne des gags d’une finesse dont il est le spécialiste et de l’humour bien gras qui réveille tes voisins. C’est aussi un régale de le voir interpréter sa propre mère. Gallienne fait du Gallienne et c’est pour notre plus grand plaisir. Après tout c’est ce qu’on venait chercher. Le passage en Angleterre est mémorable, les personnages secondaires réussis, Guillaume toujours présent, les petits défauts de réalisation n’entament pas le plaisir jubilatoire de certaines situations.
D’autant plus que le film touche la corde sensible de bien des spectateurs en traitant de la relation mère-fils. Personnellement fils-unique, je me suis parfois retrouvé, j’ai ri parfois en connivence, parfois un peu honteux, mais j’ai ri de façon bien personnelle. Je ne doute pas que toutes les mères de France se sentirons également touchées par moment (hormis peut-être celles qui aiment les congélateurs plus que de raison).
Ajoutez à ça une bande-son parsemée de musiques franchement pas mauvaises et vous obtenez un beau mélange.
Les garçons et Guillaume, à table ! est certes quelque peu maladroit, mais en réussissant à être drôle et touchant à la fois, il reste un très bon souvenir qui se renforce dès que j’y repense, que j’en reparle ou qu’il est cité autour de moi. Et puis voir tout cet engouement populaire autour du film, des salles combles pour des avant-premières sans star, deux moins avant sa sortie, les gens se l’approprier avant même de l’avoir vu en se trompant de nom (« Guillaume et les garçons, à table ! », ou ce très chouette « Ah, « Guillaume et les filles », c’est lui que je veux voir ! » dans un hall de cinéma), pour autre chose qu’une comédie bête et méchante de Dany Boon ou avec Kad Merad (même si j’aime bien), et bien ça fait plaisir.
Les Garçons et Guillaume, à table !, 4/5 étoiles chez Vodkaster.