En cette période de milieu de soldes, c’était désabusé que j’entrais dans une Fnac, résigné à n’y trouver que de soit-disants « bons plans » maquillants sans aucun talent des retours clients aux emballages éperdument défuntés et aux rabais ridiculement apathiques. Et puis, il était là. Entre des Blu-rays de troisième zone et des accessoires pour une console qui ne se vend pas, dans un grand bac rouge et vide, se tenaient cinq exemplaires d’un gros coffret collector en forme de livre. Serait-ce une intégrale incomplète de Game of Throne ? Une intégrale 4:3 de Kaamelott ? Une intégrale import zone 1 doublage québécois de Harry Potter ? Non. Plus étonnant encore : une édition limitée des Aventures de Philibert, Capitaine Puceau, un bon gros bide cinématographique de l’année 2011, avec 58 500 entrées seulement pour un film réunissant Jérémie Renier et Alexandre Astier vendu comme le nouveau bébé des producteurs d’OSS 117. Pour 3 euros.
« Mais… non… ils ont osé ? Non, je rêve ! Je vais me réveiller… »
Si ça gagne pas, ça débarasse (mais c’est gros)
Mais que diable Gaumont (avec Mandarin cinéma et M6 films) est-elle aller faire dans la galère d’une édition limitée (1 600 exemplaires) pour un tel four ?
La question se pose effectivement, et le coffret, visiblement édité en partenariat exclusif avec la Fnac, n’y répond pas.
À vrai dire, si l’idée même de ce coffret est surprenante, mon étonnement vient aussi du fait que je ne me souvienne pas de la sortie de cette édition pourtant surprenante, déjà par sa taille, puis par son contenu que je vais vous détailler.
Avant tout, sachez que je fisse parti des 58 500 risquent-tout ayant dépensé une dizaine d’euros pour voir le film en 2011 ; j’avais une bonne excuse, la présence du cascadeur Vincent Haquin que les parcfans connaissent bien (il était extraordinaire dans Main basse sur la Joconde le spectacle du Parc Astérix).
Prenons deux minutes pour nous remémorer ce que sont les Aventures de Philibert au travers de sa bande-annonce :
Si je me suis ennuyé pendant la projection (un hommage aux vieux films de cape et d’épée fort peu inspiré) il reste dans un coin de ma tête grâce à un dernier duel très drôle entre Renier et Astier, dans lequel l’effet comique recherché par les auteurs prend enfin corps, et je n’ai de cesse de repenser à lui à la moindre occasion, comme quand je lis la carte de Big Fernand. Il faut dire que le prénom Philibert n’est pas des plus répandus de nos jours et pour le jeune homme du XXIème siècle que je suis, il est difficile d’y voir autre chose qu’un hamburger et un navet.
Pandora Box
Trèves de transgressions culinaires, intéressons-nous au coffret.
La boite est très belle. En forme de gros ouvrage ancien, tout n’est qu’impression bien lisse mais le rendu est excellent.
On devine au travers la soldesque étiquette rouge que le prix « vert » de lancement était de 19,99 €, alors que le prix « officiel » Fnac sur l’étiquette code-barre est lui de 26 € mais n’a probablement jamais été appliqué.
Au dos du coffret, un classique imprimé simplement posé et maintenu par la cellophane détaille le contenu collector et reprend le verso du DVD, à savoir le résumé du film, la liste des suppléments ainsi que les (deux (extraits de)) critiques élogieuses mais pas les informations techniques détaillées (format, durée et pistes audio manquent à l’appel).
Sur la tranche, un autocollant pour numéroter les 1 600 exemplaires de cette édition numérotée. J’ai pris le plus bas disponible, le 74. Les exemplaires restants tournaient tous dans les centaines.
En ouvrant le coffret, c’est d’abord le DVD qui se présente à moi, par l’arrière ce qui n’est guère seyant. Cellophané comme il se doit, celui-ci recouvre le reste des goodies.
Parmi les informations zappées par le verso du coffret, on constate que ce DVD a été soigné puisqu’il propose des sous-titres pour souds et malentendants mais aussi des sous-titres anglais, bien trop rares sur les films français. On regrettera au passage que le disque soit zoné, en se demandant une fois de plus quel peut être le préjudice à ce qu’un tel film soit exporté vers un foyer américain ou coréen, si ce n’est le risque que son humour décalé y touche un public différent (sous-entendu : et plus réceptif puisque majoritairement jugé raté chez nous ;-)).
Sous cette pièce maitresse, nous attaquons les goodies. S’en suivent donc :
Une paire de collants rouge, ceux de Philibert. Comme l’explique l’étiquette simplement collée sur le carton blanc fort classique prévu pour accrocher n’importe quels collants dans un rayonnage de supermarché en évoquant une réplique du film, « le collant moulant de Philibert est un vêtement technique. Une matière légère et souple parfaite pour le combat. »
Une affiche du film (dimensions 40×60 cm) « dédicacée par le réalisateur » : il faut comprendre que sa signature numérisée est simplement imprimée dans l’image. Dédicacer 1 600 posters n’aurait pourtant pas été une si grosse épreuve pour qui voulait vraiment faire ce cadeau. Je veux dire : quitte à créer un coffret collector et limité pour une œuvre aussi étrange, un coffret au destin couru d’avance, autant y aller à fond. Enfin moi j’aurais trouvé ça drôle et complètement dans l’esprit. Non ?
Un CD single de la chanson de Philibert, « Bebert », œuvre interprétée par le réalisateur. C’est le gros point noir de cette édition : pourquoi se donner tant de moyens pour une si belle édition et n’inclure qu’un CD 1 titre ? Qui en plus ne dure que 2 minutes ? La bande originale existe, il eut été plus urbain et tout à fait logique d’offrir celle-ci : c’est on ne peut plus classique dans une édition collector et limitée offrant un CD, que celui-ci soit bêtement celui de la BO. Alors que là, ce single a dû être pressé exprès pour cette édition. À moins que ce ne soit un article promotionnel créé pour la sortie cinéma : le visuel choisir pour la jaquette indique la date de sortie du film (le 6 avril 2011). Ça n’excuse rien : la BO aussi a certainement été pressée en trop grand nombre et encombre des disquaires ou des soldeurs, il y en a forcément 1 600 exemplaires qui trainent dans un coin.
La seule, mais véritable, faute de ce coffret.
Le dossier de presse du film. Un bien bel objet réunissant biographies, interviews et photos des créateurs et comédiens. Bien entendu conçu pour la sortie cinéma de Philibert, il fait donc réfléchir sur l’existence du CD single : c’est peut-être bien un objet promo dont le surplus prenait de la place dans un couloir chez Gaumont.
Le scénario de Philibert. Le saint des saints. Celui qui à lui seul méritait de dépenser ses 3 euros : le scénario, entier, détaillé, avec didascalies et tout, dans une jolie version enluminée dont la couverture reprend le motif du coffret.
Au final et pour 3 euros seulement, je vais pouvoir revoir le film, qui n’est pas si mauvais qu’on le dit et mérite d’être vu à la télévision, à tête reposée, au moins pour l’entrain de ses acteurs et la présence, toujours agréable, d’Alexandre Astier ; me délecter d’un scénario joliment présenté (alors qu’il y a quelques mois une vague de scénarios américains, dont Gravity, sortaient sur internet, c’est à la mode et cette fois c’est Français madame) ; avoir chaud cet hiver avec mes nouveaux collants rouges ; caler un meuble avec le CD ; et crâner avec cet énorme coffret limité dans les rayonnages de ma DVDthèque. Mais la question demeure : qu’est-ce qui a pû pousser Gaumont (et la Fnac) à sortir une telle édition pour un tel film !
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