Je me considérais il y a encore peu de temps comme novice en matière d’escape rooms (ou escape games, il y a débat ^^). Très tenté avec quelques amis, nous avons fini par nous lancer fin 2014 et un an et demi plus tard, me voila presque habitué de la chose avec quatre « escapes » au compteur.
J’ai maintenant suffisamment de recul pour en parler, juger chacune de ces expériences.
Je publierai un article par salle, mais pas dans l’ordre chronologique : j’ai envie de vous faire entrer progressivement dans l’aventure, et si vous n’avez aucune expérience de l’escape, parler de la Première pièce est aussi le meilleur moyen de vous faire découvrir cet univers.
Ci-dessous je vous livre dors et déjà mon classement personnel des escape rooms que j’ai visité. Au fur et à mesure de la publication des tests, des liens seront ajoutés vers ceux-ci :
Mon classement des Escape Games :
1/ The Game « le Métro »
2/ Google France « Première pièce »
3/ La Pièce « Il était une pièce »
4/ Epsilon Escape « le Patient de la chambre 8 »
5/ Break Out « Évasion à Bombay »
6/ Gamescape « le Cachot de la Bastille »
L’escape game pour les nuls
Qu’est-ce qu’une escape room ? Qu’est-ce qu’un escape game ?
Réponse courte : c’est la même chose.
Réponse longue : un jeu en équipe, sorte de cellule de Fort Boyard géante, qui réunirait suffisamment de cellules de Fort Boyard classiques pour vous occuper pendant une heure. La porte par laquelle vous êtes entrés est verrouillée, et vous devez résoudre toutes les énigmes qui se présentent à vous pour sortir proprement. Si vous ne réussissez pas, c’est le personnel de la salle qui viendra vous ouvrir.
Chaque partie se déroule plus où moins de la même façon : les énigmes alternent entre des problèmes mathématiques simples (on vous fourni toujours de quoi prendre des notes), cadenas dont il faudra trouver la clé ou le code, objets cachés, mécanismes à la Professor Tim’s Incredibles Machines, … Chaque salle possède ses spécifiés, certaines demanderont surtout de l’exploration, avec des objets cachés partout, d’autre surtout de la réflexion, avec beaucoup de notes à prendre ou de casses-tête à résoudre, certaines durent un peu plus de 60 minutes, d’autres moins (mais c’est rare).
D’une façon générale, avec la multiplication des salles, leurs créateurs ont tâché de se renouveler, de pousser l’immersion et la surprise toujours plus loin, et de fait une salle offrant une succession de cadenas sera aujourd’hui jugée « old school » et des joueurs blasés (je parle pour moi) attendent un maximum de détails : des décors réalistes ainsi que des mécanismes compliqués et ludiques. Plus l’expérience réussit à faire oublier l’aspect jeu de société dans une petite salle et donne le sentiment d’être plongé à l’intérieur d’un film, mieux c’est.
Lors de ma toute première escape room, notre maître du jeu nous avait donné quelques conseils avant d’entrer, merci Chloé. Ils sont fort utiles et tout le monde ne les donne pas. Je me permets donc de vous les transmettre à mon tour :
- Écoutez-vous. Chaque fois que vous trouvez quelque chose, arrêtez-vous et énoncez-le clairement à vos amis. Ils en auront peut-être besoin plus tard sur une autre découverte.
- Organisez, rangez, triez : réunissez au même endroit tous les objets que vous découvrez. Placez à un autre endroit les objets déjà utilisés : puisque chaque objet ne sert qu’une fois (sauf dans de rares salles : donc si votre game master n’en parle pas, il est plutôt malin de lui poser la question), ne vous encombrez pas et ne vous mélangez pas les pinceaux. C’est sans doute le conseil le plus important.
- Ne paniquez pas.
Pour le reste, la FAQ du site internet de n’importe quel jeu d’évasion répondra aux questions que vous pouvez vous poser (Est-on réellement enfermés ? Est-on livrés à nous-même ? Le téléchargement pirate tue-t-il la musique ? La réponse à toutes ces questions est « NON »).
Mais le principal mystère d’un escape game reste le contenu de la salle : de façon tout à fait logique, pour préserver la surprise, le sentiment temporaire de désorientation (et, disons-le, l’émerveillement), les escapes diffusent très peu de photos, il est généralement impossible d’imaginer précisément à quoi ressemble l’intérieur des salles de jeu.
C’est là que la Première pièce de Google France entre en jeu : de part son statut de salle éphémère, et d’outil publicitaire, une session avec des célébrités de Youtube (je n’en connais qu’une, ndTK) a été entièrement filmée, le contenu entièrement spoilé de façon volontaire par ses créateurs. Donc je vais pouvoir vous décrire en détails mon aventure, sans risque de spoiler ce qui l’a déjà été. Et si vous souhaitez voir comment se passe une partie d’escape game, la démo idéale est à regarder juste ici :
Quelques remarques encore, sur cette vidéo, avant de parler de mon expérience personnelle :
- Cette salle se joue en 40 minutes
- les caméras sont (presque) toutes cachées à l’extérieur du décor (les quatre murs ont été construits de toutes pièces, c’est un (superbe) décor de cinéma), filmant à travers des miroirs sans tain qui lors de mon passage (le même jour, deux heures plus tôt) étaient remplacés par des cadres photo. Du grand art.
- La captation procure, il me semble, une sensation de lenteur qu’on ne ressent pas en jouant. L’évasion est un jeu d’équipe, qui nécessite de réfléchir, de s’écouter les uns les autres, voir, c’est préférable, de bien se connaître. Regarder des gens jouer ne rend pas compte des sensations de jeu, seulement des mécaniques.
La Première pièce : avis
Créateur : Google France (avec l’agence We Are Social et un concepteur d’escape games ayant bossé sur Prizoners)
Titre : « Première pièce »
Date : 27 mai 2016
Certaines escape rooms populaires nécessitent près d’un mois d’attente pour réserver sa place. Avec la pièce éphémère de Google, il m’a juste fallu attendre trois heures devant mon ordi. Trois heures à rafraichir la page comme un bourrin pour sauter sur une session lors de leur mise en ligne. Premier gros coup de chance : dès que j’ai appris l’existence de ce projet (au début de ces trois heures fatidiques, donc) mes amis étaient tous dispos pour répondre positivement et me donner leurs dispos immédiatement. Deuxième gros coup de chance : les sessions pour cette Première pièce sont parties un petit peu moins vite que les places pour les visites de la RATP lors des Journées du patrimoine (90 secondes max, chaque année), donc j’ai eu le temps de réserver un créneau.
Rendez-vous était donc pris pour le vendredi 27 mai, 16h, rue de Lancry, tout près de la place de la République et d’une boutique de cupcakes. À l’adresse indiquée, un porche, une cour, et au fond, une façade vitrée façon atelier, dont la porte est ouverte. Nous approchons doucement, hésitants, mais l’accueil sera très chaleureux. Le hall est large, et en face de l’entrée on repère immédiatement la porte derrière laquelle tout se jouera. Ce qui me choque tout de suite, c’est que j’ai beau me douter que la Première pièce a été entièrement construite à l’intérieur d’un grand hall, le mur qui nous sépare de la salle de jeu semble être là depuis toujours. Pour une expérience ne durant que 10 jours, c’est sacrément propre !
Il y a une atmosphère ce jour là, mélange de chance d’être ici, de tester une salle éphémère et très « VIP », et de le faire gratuitement. Notre hôte (qui brieffe également les youtubeurs dans la vidéo) est vraiment très sympathique. Je n’ai pas eu la présence d’esprit de lui demander s’il travaille pour Google, We Are Social, ou autre, mais l’ambiance était différente d’un rapport employé/client habituel. Le taux d’empathie était à son paroxysme, j’étais un peu face à un clone de moi-même, ça faisait drôle.
Le brief est cool, l’ambiance est cool, un stylo Google Maps posé sur la table est vraiment très cool, et le scénario est on ne peut plus cool : ici pas de bombe à désamorcer, pas de meurtre à élucider, et à vrai dire, même pas de pièce dont nous serions réellement prisonniers et d’où il faudrait s’échapper pour sauver nos vies. Non, nous sommes juste là pour aider et dans le pire des cas, une artiste se ridiculisera en plein showcase car son installation n’aura pas fonctionné. No. Stress. C’est décidément une question d’empathie. Nous voila donc dans l’appartement de Julie, qui est partie au 104 faire sa démo, mais a oublié de brancher une pièce importante de son installation : la fameuse première pièce.
D’où le jeu de mot : c’est à la fois, dans le scénario, la première pièce de l’installation de Julie, sa pièce maîtresse, et la première pièce d’évasion de Google ! Jean Bloguin, humoriste méta !
À l’intérieur, plus que d’habitude, je suis très vite paniqué : nous n’avons que 40 minutes et le décor est très chargé. Bon dieu, c’est sublime. Cet appartement regorge de détails. Il y en a vraiment partout. Des tonnes et des tonnes de biblots sur l’établi notamment. Du matériel de bricolage et des objets semblant fabriqués sur mesure, des pseudos-inventions de Julie, des gadgets électroniques comme des bocaux à confiture collés sous un rayonnage dont on imagine même pas à quoi ils pourraient servir s’ils étaient fonctionnels. Le ou les décorateurs s’en sont vraiment donnés à cœur joie, on est véritablement dans un décor digne du cinéma et l’aspect éphémère et VIP de la salle prend tous son sens : un tel niveau de qualité et de réalisme (peu d’objets sont fixés) serait impossible à maintenir au delà de 10 jours. Des accessoires seraient forcément volés ou simplement abimés. L’envie de repartir avec tout ce décor (ou de venir y vivre) est forte. J’hallucinais à chaque fois que mes yeux se posaient quelque part.
De l’émerveillement avec un zeste de panique, disais-je : devant un tel fourmillement de détails (tout ce dont nous aurons besoin durant les 40 minutes est déjà sous nos yeux), je ne sais pas où commencer. La première pièce est là, sur le bureau, protégée sous une cloche en plexi (Julie : t’es vraiment reloue). À côté d’elle, un écran tactile divisé en six cases dans lesquelles il semble évident qu’il faudra tracer des motifs, comme pour déverrouiller un smartphone sous Android. Finalement, à cinq personnes les choses se déroulent assez bien et très vite nous résolvons une première énigme et entrons notre premier code.
Vient alors le premier (mais unique) fail de la Première pièce : sur l’écran tactile il reste des traces de doigts des joueurs précédents. Mon passé d’agent secret mes souvenirs de Spinter Cell remontent instantanément : je passe mes doigts sur les traces et déjà je dévérouille une seconde, puis une troisième case de l’écran tactile. Une partie de moi a envie de continuer et de tuer le game en finissant la partie en cinq minutes. Plein de compassion pour mes amis, je décide d’écouter mon autre partie, qui me conseille de faire semblant de n’avoir rien vu. Empathie à la con.
Dès l’instant où j’ai appris l’existence de cette escape, jusqu’à mon entrée dans la pièce, en passant par le moment où j’ai découvert qu’elle ne durait que 40 minutes, j’étais assez sceptique sur le contenu de cette salle. Un produit gratuit proposé par Google, mettant officiellement en valeur les services Google, ne serait-ce pas un peu nul ? N’aurait-on pas l’impression d’être dans une publicité géante, dans un truc aussi exaltant que la camionette-stand de la Française des Jeux pour sa tournée des plages où les gens se battent pour un stylo qui s’accroche autour du cou (paye tes références 90’) ?
Clairement, NON. Au contraire, cette pièce fait un bien fou. Elle n’est pas bien difficile, mais l’expérience est magnifique. J’ai déjà parlé du décor. La mise en scène est superbe également. Les lumières tout autant (j’ai un doute, mais je crois bien qu’en entrant à 16h, l’éclairage simulait un après-midi ensoleillé derrière les fenêtres (cf. photo ci-dessous). Alors que les youtubeurs de 18h ont eu droit à une ambiance nocturne !). Les vidéo-projecteurs recouvrant les murs d’images (avec un léger appel au mapping) lorsqu’on résout une énigme m’ont plongé, moi le nerd, dans un état d’excitation fébrile. Les énigmes sont variées. Si zoomer sur une télé à l’aide de Kinect m’a semblé un peu futile (comme toujours avec Kinect, quoi…), le reste était super ludique. Bon sang, c’est tellement amusant de poser de gros marqueurs Google Maps aimantés sur une carte au mur ! J’avais l’impression de retomber en enfance et de m’amuser dans la Cité des enfants (version high-tech) ! L’énigme musicale avec la projection sur le sol offre sa petite dose de réflection. Et tous ces mécanismes « 2.0 » permettent de fortement limiter le nombre de cadenas, pour mon plus grand plaisir. J’en reviens encore au décor et à la mise en scène, mais lors de l’activation de l’énigme finale, la libération des Cardboards (ça sonne comme un titre de film ), je ne m’attendais pas du tout à ce qu’un tableau tombe et révèle une cache secrète.
La Première pièce était faite pour s’amuser, et clairement, je me suis amusé. Énormément. Sans que ça paraisse trop facile non-plus. Nous avons fini avec plusieurs minutes d’avance, mais à plusieurs reprises j’ai bien cru que nous ne nous en sortirions pas. J’ai douté. J’étais à fond dedans.
Une fois sortis, nous voila dans un autre espace. Dans tous les sens du terme. Une pièce blanche et presque vide, à mille lieues des nombreux détails de la salle de jeu, mais aussi une autre pièce du bâtiment, que je n’avais pas remarqué. Et encore ce constat que tout est d’un seul tenant, mais divisé par des cloisons installées pour l’occasion, mais le plus sérieusement du monde. J’aurais aimé voir le bâtiment à différentes époques. Ce qu’il abritait précédemment, puis dans quel état il se trouvait juste avant que Google ne s’y installe. Et à quoi il ressemble maintenant que Google l’a quitté.
Bref. Nous sommes sortis en 35 minutes, ce qui m’a semblé bien mais on aurait pu faire beaucoup mieux. De retour dans le hall, le stylo Google Maps me fait encore de l’œil. Je demande timidement à notre hôte s’il en a d’autres. « Vas-y, tu peux le prendre. » Mes yeux déjà illuminés s’embrasent.
J’ai testé la Première pièce. Et j’ai le plus beau stylo publicitaire au monde. Désormais mes connaissances sont doublement jalouses.
Et moi je n’ai qu’une attente : que Google transforme l’essai avec une seconde pièce. Si le nom en lui-même peut être compris comme un indice d’une envie de développer le concept, c’est surtout ce tweet du 28 juin dernier, dont la vidéo revient sur l’aventure Première pièce et se conclue par ces mots : « à bientôt pour le prochain épisode », qui laisse un véritable espoir.
Dans un escape game comme dans la vraie vie…
Vous jouez.
Vous cherchez.
Vous gagnez.#EntrezDansLeGamehttps://t.co/amkZFtTSH3— Google FR (@GoogleFR) June 28, 2016
Mais j’ai aussi une peur : rater la fenêtre d’inscription
Les photos de cet article sont toutes des photos promotionnelles de Google ou des captures d’écran de la session live, à l’exception de la photo du stylo signée moi-même.